Du nouveau poste de vice-président dans la Constitution Béninoise face aux controverses de la limitation du mandat présidentiel
Depuis l’élaboration de la constitution de la République du Bénin de 1990, celle-ci comme un acte juridique ayant l’expression de tout le peuple béninois, sous l’initiative du président Patrice TALON, elle connaitra une révision en novembre 2019.

Par : BIHONA MONGANE MSAADA, Gradué en Droit public et étudiant en deuxième licence Droit public de l’université de Lubumbashi. 
Du nouveau poste de vice-président dans la Constitution Béninoise face aux controverses de la limitation du mandat présidentiel


INTRODUTION
Il nous semble utile et important d’aborder une question comme celle-ci qui suscitera toute forme d’interprétations constitutionnelles dans les jours à venir mais à laquelle nous proposons certaines solutions de Droit; d’où, l’importance de mettre à pied le présent article.

Depuis l’élaboration de la constitution de la République du Bénin de 1990, celle-ci comme un acte juridique ayant l’expression de tout le peuple béninois, sous l’initiative du président Patrice TALON, elle connaitra une révision en novembre 2019. 

C’est cette révision de 2019, qui viendra instituer le poste de vice-président dans la constitution béninoise. Une innovation ou pas, dans le cadre de cet article nous allons examiner le sort du vice-président dans la limitation du mandat présidentiel et ici nous rappelons que «nul ne peut exercer plus de deux mandats présidentiels au Bénin »[1].

La grande question qui est posée est celle de savoir si le vice-président est aussi concerné par cette disposition et plus loin nous examinerons s’il pourrait y avoir possibilité pour quelqu’un qui a été au poste de vice-président de se porter candidat comme président de la république ou encore pour un ancien président de la république de se porter candidat à la vice-présidence. 

Toutes ces questions trouvent des réponses dans le présent article.

Toutes les sociétés politiques modernes comportent un corps de règles écrites ou non qui sont destinées à fixer les modalités de conquête et d’exercice du pouvoir d’Etat[2]
Cette Constitution occupe donc une place dans tous les régimes politiques contemporains et voilà pourquoi nous affirmons que tout pouvoir politique dans un Etat démocratique tire son fondement dans la Constitution. 
Cette dernière connait plusieurs interprétations selon que l’on est juriste ou pas mais celle-ci nécessite une interprétation stricte et objective. 

C’est ainsi que dans le présent article pour répondre à toutes ces questions nous nous sommes proposés une marche pédagogique à suivre et nous avons subdivisé cet article en deux points dont le premier porte sur l’examen du mandat présidentiel au Bénin et le second point portera sur la place de la vice-présidence dans les limites du mandat présidentiel; dans le but d’examiner la possibilité ou l’impossibilité pour un vice-président de se porte candidat président, ou encore la possibilité ou l’impossibilité selon le cas pour un ancien Président de la République du Bénin de se porter candidat au poste de vice-président de la République. 
Cet examen sera clôturé par une conclusion pour mieux présenter l’essentiel de notre étude.

1. LA QUESTION DU MANDAT PRESIDENTIEL DANS LA CONSTITUTION BENINOISE
Comme nous pouvons le comprendre, le constituant béninois a toujours consacré une grande attention à la question liée aux mandats présidentiels et leur limitation. 
Dans ce premier temps nous voulons comprendre de quelle manière dont la Constitution de la République du Bénin de 1990 telle que modifiée et complétée par la loi n °2019-40 du 07 novembre 2019 portant révision de la Constitution béninoise aborde cette question avec une pertinence très particulière qui a attiré notre attention.

Nous pouvons donc affirmer avec certitude, que le constituant béninois exprime sa volonté de construire un Etat de droit et accorde une attention particulière à la limitation du mandat présidentiel. 
Nul n’ignore que depuis 1990 Le pays de Talon a déjà connu quatre présidents de la République dont certains sont encore en vie.

L’article 42 de la Constitution béninoise dispose que « le Président de la République est élu au suffrage universel direct, pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois ». 
Voilà la façon dont la question du mandat présidentielle est orientée. 
Cette disposition constitutionnelle garantit donc l’alternance politique et gouvernementale au peuple béninois. 
L’alinéa 2 de cette disposition vient encore s’appesantir sur la limitation du mandat présidentiel en affirmant qu’ « en aucun cas, nul ne peut, de sa vie, exercer plus de deux mandats de Président de la République ». 
Si pour certains, cet alinéa est pris comme une répétition de ce qui est annoncé à l’alinéa premier, pour nous ce deuxième alinéa vient juste rappeler que quel que soit la façon dont ces deux mandats ont été exercés, (successivement ou pas) nul ne peut aller au-delà de deux mandats présidentiels.

La plus part de constitutions qui précèdent celle de 1990, fixent également la durée du mandat présidentiel à cinq ans, font exceptions la Charte du 1er septembre 1966, la Charte du 26 décembre 1969 (Directoire), la Charte du 07 mai 1970 (Conseil présidentiel), l’Ordonnance n°74-68 du 18 novembre 1974 portant structure du pouvoir sous le GMR (Gouvernement militaire révolutionnaire) qui sont restées muettes sur la question, certainement en raison des circonstances dans lesquelles elles sont intervenues[3]
Il est donc aisé de comprendre que la volonté de limitation du mandat présidentiel ne date pas d’aujourd’hui au Bénin et l’esprit démocratique a toujours été le partage du peuple béninois.
C’est dans ce cadre que la loi de 2019 qui est venue modifier et compléter la Constitution Béninoise reste dans cette même logique d’esprit quand bien même qu’elle vient instituer le poste de vice-président sans toutefois tenir compte de cette réalité limitative du mandat présidentiel. Voilà même l’objet du point suivant.

2. LE POSTE DE VICE-PRESIDENT ET LA LIMITATION DU MANDAT PRESIDENTIEL AU BENIN
La révision de la Constitution béninoise du 07 novembre  2019 vient instituer un nouveau poste de vice-président au Bénin
Depuis l’élaboration de cette Constitution en 1990, c’est avec la révision de 2019 qui est aussi la toute première révision que connait celle-ci qui va intégrer le poste de vice-président dans la Constitution Béninoise.

Cette innovation figure à l’alinéa 3 de l’article 41 qui dispose qu’ « un vice-président de la République assure la vacance de la présidence de la République »  mais dans les conditions qui sont fixées par la même Constitution. 
Une question majeure que tout chercheur peut se poser est celle de savoir si cette nouvelle institution est une innovation ou une simple adhésion à la tradition qui se crée déjà dans la plus part des Etats ? 
De notre part nous constatons une innovation et la réponse se trouve dans la lecture de l’article 5O de la constitution béninoise qui nous donne les différentes attributions du vice-président et dont l’intérim demeure l’attribution majeure.

Une préoccupation reste certaine et non répondue c’est celle relative à la limitation du mandat présidentiel. 
Certes, le poste de vice-président est institué mais la Constitution ne précise pas expresisverbis si la limitation du mandat du président de la République frappe aussi le vice-président. 
Un vide juridique se crée et voilà même l’importance de la présente étude.

Il est vrai que la Constitution n’est pas expresse sur la limitation du mandat du vice-président mais elle n’est pas aussi totalement muette du simple fait qu’elle répond tacitement à cette question. 
L’analyse de l’article 43 de cette même Constitution nous précise que « le Président de la République est élu en duo avec un vice-président de la République. L’élection du duo Président et le vice-président de la République a lieu au scrutin majoritaire à deux tours ». 
Voilà ce qui explique même la théorie de l’institutionnalisation de la Présidence que nous avons voulu développer dans le cadre de cette étude. 

Par la présente théorie nous prenons la présidence (Président de la République et vice-président de la République) comme un seul corps dont tout ce qui frappe cette institution (présidence) frappe les deux organes (Président de la République et vice-président de la République). 
A travers cette théorie nous pouvons donc facilement comprendre que même le vice-président de la République du Bénin est concerné par l’article 42 de la constitution béninoise et ne peut pas prétendre un jour briguer un troisième mandat sous prétexte qu’il n’est pas frappé par l’article 42 de la Constitution Béninoise.

Cette même théorie nous pousse à affirmer que jamais un vice-président après ses deux mandats à la vice-présidence ne peut prétendre  se présenter candidat au poste du Président de la République car cela devra être compris comme un troisième mandat qui est anticonstitutionnel et vice versa au Président de la République ayant fait deux mandats qui ne peut pas se présenter candidat au poste de vice-président pour ne pas tomber sous les pièges de l’article 42 de la Constitution Béninoise.

Même si la Constitution béninoise ne reconnait pas des prérogatives personnelles au Vice-président de la République tout en l’excluant même parmi les membres du gouvernement mais elle nous précise que ce dernier peut représenter le Président de laRépublique sur demande de celui-ci[4] et ceci ne doit pas constituer une échappatoire pour prétendre se porter candidat une fois après avoir usé de ses deux mandats.

Si certains peuvent nous demander si les dispositifs de l’article 42 frappe tous les agents de la présidence, alors ils n’ont pas compris de quel constat nous sommes partis pour aboutir à la théorie de l’institutionnalisation de la présidence
Si nous pouvons recourir à une étude comparative, nous pouvons préciser que le poste de vice-président n’est pas institué dans tous les Etas mais malgré cela  le poste de Président de la République est une institution du pays et certaines Constitutions comme nous pouvons le lire dans la Constitution de la République démocratique du Congo[5] précisent que le Président de la République est la toute première institution du pays. 
Il sied donc de souligner que le poste de Président de la République et celui du Vice-président de la République sont inséparables. 
Cette possibilité de les détacher peut encore se concevoir si au moins le vice-président de la République n’est pas issu d’une élection et au même scrutin que le président de la République.

Du simple fait que tous deux sont issus du même scrutin, la théorie de l'institutionnalisation de la présidence considérant le Président de la République et le vice-président de la République comme un seul corps trouve son fondement et devient donc incontournable et fait à ce que la limitation du mandat présidentiel ne puisse concerner non seulement le Président de la République mais aussi le vice-président de la République.

CONCLUSION
Nous voici au terme de notre étude, brève qu’elle soit, qui avait pour but d’examiner le nouveau poste de vice-Président de la République du Bénin institué par la révision de la Constitution béninoise du 07 novembre 2019 sous l’initiative du Président Patrice Talon à l’épreuve de la limitation du mandat présidentiel.

Nous avons voulu comprendre par cette étude si le mandat présidentiel béninois qui est limité à cinq ans une fois renouvelable était aussi imposable au vice-président de la République.
La théorie d’institutionnalisation de la présidence de la République développée par cette étude nous a montré que  cette limitation qui s’impose sur le Président de la République du Bénin s’impose aussi sur le vice-président dans la mesure où tous sont élus au même scrutin et bien que la Constitution ne limite pas de manière explicite le mandat du vice-président, cette théorie trouve une réponse à ce vide juridique.

Cet article qui répond à plusieurs préoccupations de l’avenir nous fait voir qu’en aucun cas un Président de la République du Bénin ayant fait deux mandats ne peut prétendre se porte candidat à la vice-présidence un jour et vice versa pour tout vice-président béninois ayant fait ses deux mandats. 
Que ces mandats soient consécutifs ou pas, l’alinéa 2 de l’article 42 de la Constitution béninoise n’accorde pas cette possibilité.

Voilà, ce qui a constitué l’essentiel de notre étude et en toute simplicité, nous disons bienvenu aux critiques, commentaires et suggestions pour non seulement notre croissance scientifique mais aussi la croissance de la science.  




[1]L’Alinéa 2 de l’article 42 de la constitution de la République du Bénin telle que modifiée et complétée à ce jour par la loi de 2019.
[2]Avant-propos de David ROBERT, dans un ouvrage publié sous la Fondation Konrad Adenauer, commentaire de la Constitution Béninoise de 1990, Cotonou, juillet, 2009, p.4
[3] Ouvrage publié sous la Fondation Konrad Adenauer, commentaire de la Constitution Béninoise de 1990 ; Esprit, lettre, interprétation et pratique de la Constitution par le Bénin et ses institutions, Cotonou, juillet, 2009, p. 61
[4] Lecture minutieuse de l’article 54 de la Constitution Béninoise telle que modifiée par  la loi n°2019-40 du 07 novembre 2019. 
[5]Lire l’article 68 de la constitution de  la république du Congo du 18 février 2006 telle que modifiée par la loi n° 11/002 du 20 Janvier 2011.

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