Justice pour mineurs: L'ONU et la RDC
Un système complet de justice pour enfants doit être mis en place, afin de préserver les mineurs contre certains traitements.
PAR : Maître Junior KANYINDA WA KANYINDA
Avocat au Barreau de Kinshasa/Matete
Assistant des Universités à la faculté de droit
Défenseur des droits de l’homme au sein de l’AUDF-ONG
E-mail : Kanyindaj933@gmail.com
Etude transversale entre  les Normes/Règles de Nations Unies relatives à la justice pour mineurs et la Loi congolaise portant protection de l’enfant
                          
 
Résumé
Aux fins d’une protection judiciaire efficace pour mineurs, un système complet de justice pour enfants doit être mis en place, dans le but d’aboutir à une justice distincte de celle des adultes, afin de préserver les enfants contre certains traitements tendant à nuire à leur personne.  En vue de militer pour la resocialisation et réinsertion de l’enfant en contact avec la justice pénale, comme présumé coupable d’un comportement pénalement qualifié  d’abord, et reconnu coupable de ce comportement ensuite, l’Organisation de Nations Unies a élaboré certaines Normes et Règles relatives à la justice pour mineurs. Ces instruments sont destinés à être mise en œuvre dans les politiques judiciaires de chaque Etat signataire de ceux-ci et  membre de Nations Unies, particulièrement dans les textes relatifs à la protection de l’enfant. La République Démocratique du Congo, étant l’un de ces Etats, l’étude s’est fixée comme objectif, de mettre sur la sellette et de démontrer  le dialogue qui existerait entre les textes des Nations Unies concernant la justice pour mineurs et la Loi congolaise portant protection de l’enfant dans le seul contexte de la justice. Avant de conclure au fait que cette Loi, sans pour autant se situé dans l’un des systèmes de justice pour mineurs (modèle de protection, modèle de justice,  justice réparatrice), elle incarne la lettre et l’esprit des Normes et Règles de Nations Unies ; dans le développement,  l’étude présente panoramiquement la procédure congolaise de la justice pour mineurs-sur le plan textuel-en la comparant au système onusien afin d’en appréhender les arcanes et la vulgarisée.
  
INTRODUCTION
La préservation de la sécurité publique est un but légitime du système de justice, y compris le système de justice pour enfants. Les enfants diffèrent des adultes par leur degré de développement physique et psychologique. Ces différences constituent le fondement de la reconnaissance d’une responsabilité atténuée et d’un système distinct prévoyant une approche différenciée et personnalisée.
Les systèmes qui permettent de traiter les enfants en conflit avec la loi différemment des adultes existent depuis plus d'un siècle. Ils sont nés avec la création d'établissements distincts pour les mineurs délinquants et pour les mineurs « en danger », suivie peu de temps après par l'adoption de lois instituant des juridictions séparées pour les mineurs. Des systèmes très différents les uns des autres existent depuis longtemps mais l'approche qui prévaut consiste à s'intéresser en premier lieu au sort de l'enfant, c'est-à-dire à son intérêt supérieur. Cette approche repose sur l'idée que toute intervention doit servir l'intérêt supérieur de l'enfant, en privilégiant ses besoins et non ses actes, et en s'appuyant sur l'action des travailleurs sociaux qui assistent les Tribunaux à titre professionnel. Il n'est pas rare qu'une justice des mineurs de ce type soit assortie de divers établissements de traitement et d'enseignement dont la mission est de rééduquer et de réinsérer les délinquants juvéniles, ou les mineurs considérés comme en danger. Il existe d'autres types de justice des mineurs;[1] ils reposent sur un modèle judiciaire qui s'apparente beaucoup plus à la justice pénale des adultes, ou à des juridictions administratives ou autres instances informelles habilitées à juger. Enfin, dans certains pays, il n'y a pas vraiment de régime particulier pour les enfants en conflit avec la loi.[2]
En fait, la justice des mineurs  privilégie non seulement la nature de l'infraction commise mais aussi les causes profondes du passage à l'acte et la situation particulière du mineur en question. Toutefois, nombreux de systèmes de justice des mineurs, sinon la plupart, ne fonctionnent pas réellement dans l'intérêt supérieur de l'enfant, et les droits des enfants peuvent y être bafoués de diverses manières.
La justice pénale est souvent entièrement liée aux prestations sociales dispensées dans d'autres domaines comme l'accès à l'éducation en général, l'accès à la santé et l'accès aux services sociaux. Nombreux sont les travaux de recherche qui mettent en lumière une corrélation entre familles dysfonctionnelles, société et délinquance juvénile. Aussi, pour évaluer la justice des mineurs d'un pays donné, l'évaluateur devra parfois s'intéresser aux facteurs sociétaux et aux questions de développement, qui sortent du domaine de la justice pénale. Le droit international en matière de justice des mineurs est fourni et détaillé et l'on peut aussi se référer à des instruments plus généraux en matière de justice pénale et de politique pénale.
C’est que le système de la justice pour mineurs recherche le bien-être du mineur et fait en sorte que les réactions vis-à-vis des délinquants juvéniles soient toujours proportionnées aux circonstances propres aux délinquants et aux délits.
Cependant, depuis sa création, l’Organisation des Nations Unies contribue à l’élaboration et à la promotion de principes internationalement reconnus de prévention du crime et de justice pénale. D’année en année, de nombreuses règles et normes des Nations Unies relatives à la prévention du crime et à la justice pénale ont pris forme, sur des questions multiples comme la justice pour mineurs, le traitement des délinquants, la coopération internationale, la bonne gouvernance, la protection des victimes et la violence contre les femmes.
Les Normes et Règles des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale ont permis de construire, au fils des ans, une vision collective de la manière dont le système de justice pénale devrait être structuré. En dépit de leur nature « non contraignant », elles ont sensiblement contribué à promouvoir des structures de justice pénale plus efficaces et plus équitables dans trois dimensions. Premièrement, elles peuvent être utilisées au niveau national pour susciter des évaluations approfondies qui conduisent à l’adoption de la nécessaire réforme de la justice pénale. Deuxièmement, elles peuvent aider les pays à élaborer des stratégies sous régionales et régionales. Troisièmement, globalement et au plan international, elles constituent de « bonnes pratique » qui peuvent être adaptées par les États pour répondre à leurs propres besoins.[3]
Au sujet de la force contraignante des Règles des Nations Unies, Michel Lachet ajoute « …le fait que ces Règles n’ont pas de force contraignante en soi ne veut pas dire que les Etats peuvent choisir de les respecter, de les appliquer, de les ignorées ou de les violer à leur guise. Ces Règles clarifient le contenu d’autres normes internationales contraignantes. Et voilà leur véritable valeur, en termes légaux »[4]. A Oscar D’amour d’ajouter « Les Règles des Nations Unies adoptées lors d’une Assemblée Générale dans le respect des droits de la personne ne lient pas les Etats, mais selon les circonstances de leur adoption, celles-ci peuvent constituer la preuve de  la coutume internationale. Elles ont donc un poids moral et une force politique puisque les Règles élaborées sont partagées par la communauté internationale. Elles constituent par ailleurs un guide d’interprétation de premier choix de la loi nationale si cette dernière, en certaines circonstances, nécessite une interprétation dans une situation particulière ».[5]
D’une manière générale, les principaux instruments concernant  spécifiquement la justice des enfants sont la Convention relative aux droits de l'enfant (1989), l'Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l'administration de la justice pour mineurs (1985), les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté (1990), les Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (1990) et les Directives relatives aux enfants dans le système de justice pénale (1997).
Parmi les autres instruments qui s'appliquent de manière plus générale, on citera les Règles minima des Nations Unies pour l'élaboration de mesures non privatives de liberté (Règles de Tokyo), les Principes fondamentaux concernant le recours à des programmes de justice réparatrice en matière pénale, l'Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus, la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.  
Dans le souci de protéger ses enfants, la République Démocratique du Congo a pris une loi protégeant l’enfant. Cette loi protège l’enfant sur tous les points de sa vie, voire sur le plan judiciaire. C’est que, eu égard de sa vulnérabilité, le législateur congolais comme d’autres bien sûr, a voulu réserver à l’enfant soupçonné d’avoir commis un acte pénalement qualifié d’infraction et à ceux reconnu l’avoir perpétré, un traitement diffèrent des autres êtres humains (adultes). C’est ainsi qu’il a réservé toute une section consacrée à la protection de judiciaire de celui-ci.
Par ailleurs, il est très important de souligner que hormis certains textes nationaux et internationaux pertinent en matière de la protection d’enfants, la RDC s’inspire aussi notamment des règles et principes des Nations Unies. Il s’agit donc des principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad), de l’Ensemble de règles minima des Nations Unies  concernant l’administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing), ainsi que les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté.[6]
 

De ce qui précède, il nous semble utile de lire transversalement ces règles et normes des Nations Unies avec la Loi congolaise portant protection de l’enfant ; c’est-à-dire faire  une concertation ou collaboration entre elles en vue d’évaluer la protection judiciaire de l’enfant en République Démocratique du Congo.
Afin de bien mener la présente étude et pour de raison méthodologique, il parait plus logique de comprendre la portée de ces instruments (I) et voir à quel niveau il existe, si pas une sorte de mimétisme, mais une concertation avec la Loi congolaise portant protection de l’enfant (II).
I.                   De la portée des Normes et Règles de l’ONU relatives à la justice pour mineurs
D’entrée de jeu, il importe de rappeler que toutes les normes n’ont pas la même force juridique. Alors que les textes dénommés traités, conventions, pactes ou encore chartes sont juridiquement contraignants vis-à-vis des Etats qui les ont signés et ratifiés, d’autres instruments dénommés déclarations, lignes directrices, stratégies ou règles ont une force juridique relative pour les Etats ou organisations internationales qui ont pris l’initiative de les signer et d’y adhérer. Généralement, l’adoption des instruments ayant force contraignante passe par le processus de signature et de ratification ou d’adhésion alors qu’une déclaration, par exemple, ne fait pas l’objet, en principe, de ratification. A titre illustratif, la Convention Internationale relative aux Droits de l’Enfant (CIDE) et le Pacte international relatif aux droits Civils et Politiques (PIDCP) produisent des effets de droit à l’égard des Etats parties qui s’engagent ainsi, après leur ratification ou adhésion, à adopter, au niveau national, des mesures d’ordre législatif, institutionnel, programmatique, réglementaire ou autres pour donner effet aux dispositions ratifiées.
Or, en matière d’administration de la justice pour enfants, pourrait-on rappeler, il existe un nombre élevé d’instruments considérés comme non contraignants. La force juridique atténuée attribuée à ces instruments peut parfois présenter des avantages puisque les Etats, moins préoccupés par la pression conventionnelle et le contrôle qui s’y attache, s’y conforment peu ou prou. Même si ces instruments n’ont pas la force juridique équivalente à celle des traités, ils précisent, clarifient et détaillent avant tout des dispositions contenues dans ces mêmes traités. Les références répétées et systématiques à ces instruments dans les fora internationaux par les Etats, ainsi que dans les résolutions dédiées des Nations Unies démontrent la pertinence de leur apport juridique et pratique.
En effet, comme relevé à l’introduction de la présente étude, la Convention Internationale relative aux droits de l'enfant, le Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile, l’Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l'administration de la justice pour mineurs, les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté, les Règles minima des Nations Unies pour l'élaboration de mesures non privatives de liberté, les Directives relatives aux enfants dans le système de justice pénale, les Lignes directrices en matière de justice dans les affaires impliquant les enfants victimes et témoins d’actes criminels. Les instruments juridiques internationaux relatifs à la protection des enfants victimes et témoins/renseignants, quoique très utiles dans la protection judiciaire de l’enfant, sont exclus dans le champ de l’étude sous examen,[7] seuls, ceux relatifs aux enfants soupçonnés, accusés ou convaincus d’infraction à la loi pénale entrent dans ce cadre.
Toutefois, il est intéressant de préciser que, les Directives relatives aux enfants dans le système de justice pénale sont adressées au Secrétaire Général et aux organismes et programmes compétents des Nations Unies, aux États parties à la Convention Internationale relative aux droits de l’enfant en ce qui concerne son application, ainsi qu’aux États Membres en ce qui concerne l’utilisation et l’application de l’Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs (les Règles de Beijing) , des Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (les Principes directeurs de Riyad), et des Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté (Règles de la Havane ou RPL).[8] D’où puisque ces normes et règles qui sont en quelque sorte engloutit par les Directives relatives aux enfants dans le système de justice pénale, il nous parait plus logique de ne donner que la portée de celles-ci (A)
A.    Les directives relatives aux enfants dans le système de justice pénale (Résolution 1997/30 du Conseil Economique et Social)[9]
Conformément à la résolution 1996/13 du Conseil économique et social du date du 23 juillet 1996,[10] les présentes Directives relatives aux enfants dans le système de justice pénale ont été mises au point lors de la réunion du groupe d’experts chargé d’élaborer un programme d’action visant à promouvoir l’utilisation et l’application effectives de règles et normes internationales en matière de justice pour mineurs, tenue à Vienne du 23 au 25 février 1997 avec l’appui financier du Gouvernement autrichien. Pour rédiger les Directives, les experts ont tenu compte des points de vue exprimés par les gouvernements et des informations qu’ils ont présentées.
Vingt-neuf experts de 11 États situés dans différentes régions, des représentants du Centre pour les droits de l’homme du Secrétariat, du Fonds des Nations Unies pour l’enfance et du Comité des droits de l’enfant, ainsi que des observateurs d’organisations non gouvernementales actives dans le domaine de la justice pour mineurs, ont participé à la réunion.
Rappelons que les Directives sont destinées aux États parties à la CIDE[11] en ce qui concerne son application, ainsi qu’aux États Membres des Nations Unies concernant l’utilisation et l’application des Règles de Beijing,[12] les Principes directeurs de Riyad, et Les Règles de la Havane,[13] tous ci-après dénommés « Normes et Règles des Nations Unies en matière de justice pour mineurs »).[14]
Il est cependant important de circoncire le but ou objectif desdites Directives et ses considérations générales.
B.     But, objectif et considérations générales des directives relatives aux enfants dans le système de justice pénale
Il va falloir traiter du but et de l’objectif (1) avant d’aborder les considérations générales (2) des directives relatives aux enfants dans le système de justice pénale.
1.     But et objectif
Les Directives ont pour but de définir un cadre qui permettra:  D’appliquer la Convention relative aux droits de l’enfant et de chercher à réaliser ses objectifs en ce qui concerne les enfants dans le contexte de l’administration de la justice pour mineurs ainsi que d’utiliser et appliquer les Normes et Règles des Nations Unies en matière de justice pour mineurs et autres instruments connexes tels que la Déclaration des principes fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la criminalité et aux victimes d’abus de pouvoir; De faciliter l’octroi d’une assistance aux États parties à la Convention en vue de son application effective ainsi que celle des instruments connexes.[15]
2.      Considérations générales
Les Directives pour être utiliser tant au niveau international que national exige le respect de la dignité humaines, conformément aux quatre grands principes fondamentaux de la CIDE, à savoir la non-discrimination, notamment la sensibilisation aux comportements discriminatoires fondés sur le sexe; la défense de l’intérêt supérieur de l’enfant; le droit à la vie, à la survie et au développement et le respect des opinions de l’enfant; que l’on donne la priorité aux droits des enfants.[16]
Elles nécessitent en outre pour leur mise en œuvre, que l’on puisse adopter une approche holistique de mise en œuvre grâce à la maximisation des ressources et des efforts; intégrer les services sur une base interdisciplinaire; faire participer les enfants et les secteurs concernés de la société; renforcer le potentiel des partenaires grâce à un processus de développement; faire en sorte que le programme soit viable sans appui externe; appliquer équitablement le programme, notamment en faire profiter ceux qui en ont le plus besoin; appliquer le principe de la responsabilité et de la transparence des activités; mener une action basée sur des mesures préventives et correctives efficaces. Des ressources suffisantes en matière de personnel, d’organisation, de techniques, de finances et d’information doivent être consacrées au programme et utilisées de manière efficace aux niveaux international, régional, national, provincial et local, en collaboration avec les partenaires concernés, y compris les gouvernements, les organismes des Nations Unies, les organisations non gouvernementales, les groupements professionnels, les médias, les établissements universitaires, les enfants et autres membres de la société civile, ainsi que d’autres partenaires.[17]
Au demeurant, ces directives prônent que des mesures doivent être prises au niveau des politiques, de la prise de décisions, de l’encadrement et des réformes pour faire en sorte que d’abord les principes et dispositions de la Convention relative aux droits de l’enfant et des règles et normes des Nations Unies en matière de justice pour mineurs soient pleinement pris en compte pour ce qui est des lois, de la politique et des pratiques nationales et locales, notamment grâce à la création d’un système spécial de justice pour mineurs qui garantisse les droits de l’enfant, prévienne toute violation desdits droits, développe le sens de la dignité et de la valeur de l’enfant et respecte pleinement son âge, son stade de développement et son droit de participer véritablement à la vie en société et à y contribuer. Ensuite, que les enfants soient informés, dans des termes qui leur sont accessibles, du contenu des instruments susmentionnés. Au surplus, il faudrait établir, le cas échéant, des procédures pour veiller à ce que chaque enfant soit informé des droits que lui confèrent ces instruments, tout au moins à partir de son premier contact avec le système de justice pénale et pour lui rappeler qu’il a l’obligation de respecter la loi . Enfin, que le public et les médias soient éduqués pour qu’ils comprennent l’esprit, les objectifs et les principes d’une justice axée sur l’enfant, conformément aux Normes et Règles des Nations Unies en matière de justice pour mineurs.
L’essentiel sur ces Directives ayant été évoqué, il convient de ressortir à présent la concertation avec la loi portant protection congolaise portant protection de l’enfant.
II.                Concertation entre les Normes et Règles de l’ONU relatives à la justice pour mineurs  et la loi congolaise portant protection de l’enfant
Il serait illogique à notre sens d’aborder cette question sans au préalable ressortir le contenu de la Loi (RDC) portant protection de l’enfant (A). Ce n’est que après l’avoir fait, qu’il sera question d’épingler le dialogue qui existerait entre les Normes et Règles des Nations Unies et cette Loi (B).
A.    La loi Congolaise portant protection de l’enfant
Dès l’abord, il sied de relever que le dispositif normatif de protection de l’enfant en République démocratique du Congo trouve son premier fondement dans la Constitution du 18 février 2006, qui affirme en préambule l’adhésion et l’attachement du peuple congolais aux Conventions des Nations Unies sur les droits de l’enfant.[18] La Constitution définit l’enfant comme étant « toute personne, sans distinction de sexe, qui n’a pas encore atteint 18 ans révolus » (article 41 de la Constitution). Il en découle une série de droits constitutionnellement reconnus à l’enfant, à savoir : L’interdiction des mariages forcés (article 40, alinéa 1), le droit de jouir de la protection de sa famille, de la société et des pouvoirs publics (article 41, alinéa 3), le droit de recevoir des soins et une éducation de la part de ses parents, avec l’aide des pouvoirs publics (article 40, alinéa 3) , le droit à une protection des pouvoirs publics contre toute atteinte à sa santé, à son éducation et à son développement intégral (article 42), le droit à une protection générale contre l’abandon et la maltraitance, notamment la pédophilie, les abus sexuels ainsi que l’accusation de sorcellerie (article 41, alinéa 4) et contre toutes les autres formes d’exploitation (article 41, alinéa 7), une protection spéciale des parents contre tout acte de violence tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du foyer (article 41, alinéa 5), une protection spéciale des pouvoirs publics pour les enfants en situation difficile (article 41, alinéa 6), le droit à l’éducation scolaire (article 43), l’accès à l’enseignement sans discrimination (article 45).
Plus n’est besoin de rappeler que c’est en application des engagements pris en ratifiant la Convention Internationale relative aux Droits de l’Enfant et la  Charte Africaine de Droit et du Bien-Etre de l’Enfant, d’une part, et en exécution de la Constitution, d’autre part que le législateur a pris La loi portant protection de l’enfant promulguée en 2009[19], dont il faudra ici dégager la charpente d’une manière panoramique (1) qui sera suivi d’une brève sommaire(2).
1.      La charpente de la Loi portant protection de l’enfant
La Loi portant protection de l’enfant est le texte de référence en matière de promotion, de protection et de mise en œuvre des droits de l’enfant en République Démocratique du Congo. Elle abroge, en vertu de son article 201, toutes les dispositions antérieures contraires relatives aux enfants en contact avec la loi, y compris le décret du 6 décembre 1950 relatif à l’enfance délinquante qui régissait  l’administration de la justice pour enfants.
Elle a procédé à l’harmonisation de la législation interne avec les engagements conventionnels de la RD Congo au titre des traités régionaux et internationaux ratifiés relatifs aux droits de l’enfant et des recommandations formulées à la RD Congo par les mécanismes régionaux et internationaux de supervision pertinents. Elle (La loi de 2009) a ainsi essayé d’intégrer notamment les dispositions de la Convention relative aux droits de l’enfant des Nations Unies (CIDE) de 1989 et de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant (CADBE) de 1999, deux instruments nommément cités dans le préambule de la loi. Elle est subdivisée en cinq (5) Titres de la manière suivante :
·        Titre I : Dispositions générales : il invoque les droits et les devoirs des enfants ;
·        Titre II : Protection sociale de l’enfant : il comprend quatre chapitres sur la protection ordinaire, la protection spéciale, la protection exceptionnelle et les organes de protection sociale ;
·        Titre III : Protection judiciaire : il porte sur les tribunaux pour enfants, leur compétence, la procédure relative aux enfants en conflit avec la loi et la médiation ;
·        Titre IV : Protection pénale : il couvre la protection des enfants contre les infractions avant et après la naissance ;
·         Titre V : Dispositions transitoires, abrogatoires et finales.
 
 
2.      Sommaire de la Loi
Il est de bonne méthode pour mieux analyser un texte et aussi le faire cerner, de ressortir sa portée ou son contenu. Pour ce faire, il va falloir emprunter honnêtement la piste éclairée par certains penseurs congolais[20].
La Loi de 2009 reprend dans ses articles 3 à 12, les principes fondamentaux relatifs aux droits de l’enfant tels que :
·         La non-discrimination (articles 3 et 5) qui exige l’égalité de tous les enfants devant la loi et, partant, une égale protection (article 4) ;
·         L’intérêt supérieur de l’enfant en son article 6;
·         La participation de l’enfant à travers l’expression de son opinion (article 7) ;
·         l’interdiction de la torture et des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ainsi que la peine de mort et la servitude pénale à perpétuité (article 9).
Elle consacre aussi, l’interdiction de la détention illégale ou arbitraire (article 10), la possibilité de contester une mesure privative de liberté (article 12 alinéa 2), le droit d’être traité avec humanité en détention, d’y être séparé des adultes et de maintenir, malgré tout, le contact avec ses proches (article 11) ainsi que le droit de bénéficier, pour sa défense, d’une assistance juridique gratuite (article 12 alinéa 1).
A son article 8, il est prévu l’accompagnement psychosocial et la médiation comme mécanismes de résolution à l’amiable des questions concernant l’enfant en conflit avec la loi. Aux articles 13 à 43 sont divers autres droits de l’enfant dont ceux à la vie et survie, au nom, à l’identité et à l’enregistrement à la naissance, la liberté d’expression et d’association, à l’information, y compris la diffusion par les médias d’une information saine, de jouir du meilleur état de santé possible : alimentation saine, suffisante et équilibrée, lutte contre la morbidité et la mortalité infantile, à un niveau de vie suffisant pour permettre un développement intégral, à la pension alimentaire, à l’éducation,  à la protection, à la vie familiale, la réunification familiale, le lien familial et le maintien de l’enfant dans le milieu familial, la participation de l’enfant dans toute procédure judiciaire ou administrative le concernant est prévue, etc.,
Cette Loi  est  a apporté des innovations majeures dans le cadre juridique et institutionnel relatif à l’administration de la justice pour mineurs en RDC. En clair, Elle prône une justice pour enfants spécialisée, en créant et instituant notamment des Tribunaux pour enfants (TPE) (article 84) et des Brigades spéciales de protection de l’enfant (BSPE) (article 74 point 4 et article 77), les règles de procédure, les méthodes de travail et les approches différentes de celles applicables aux adultes, des garanties procédurales applicables aux adultes en droit commun, à qui s’ajoutent celles relatives spécifiquement aux enfants (article 104). La Loi consacre une justice pour enfants orientée vers les mesures et pratiques réparatrices. En effet, elle a institué des Comités de médiation (article 135), comme mécanismes de déjudiciarisation. Elle ne prévoit pas en tant que tel de mesures de privation de liberté mais plutôt des mesures de placement éducatif dans des structures étatiques ou non étatiques à caractère social pour suivre un programme socio-éducatif en vue de la préparation de la réinsertion durable de l’enfant en conflit avec la loi. Les alternatives à la privation de liberté sont la règle.
En sus, elle préconise une justice pour enfants tournée vers la réinsertion. En faisant des assistants sociaux, des psychologues voire des psychiatres et pédagogues des acteurs majeurs du système. De plus, dans son préambule, elle se fixe comme objectifs l’épanouissement intégral de la personnalité de tout enfant, la préparation à ses responsabilités citoyennes ainsi que la garantie de son droit à bénéficier de différentes mesures, notamment à caractère social et éducatif.  C’est ainsi, elle institue des établissements de garde, d’éducation ou de rééducation de l’Etat (EGEE) (article 108, LPPE) et des établissements de rééducation de l’Etat (ERE) (article 117, LPPE) pour parvenir à cette resocialisation. Les familles d’accueil et les couples de bonne moralité sont également visés pour la réinsertion de l’enfant en conflit avec la loi ; il en de même des structures privées à caractère social, comme cadre de formation, de rééducation et de resocialisation.
De ce qui précède, il convient alors, de ressortir le cadre de la collaboration entre cette Loi et les Normes et Règles des Nations Unies relatives à la justice pour mineurs. 
B.     Collaboration entre les Normes et Règles et normes de l’ONU relatives à la justice pour mineurs et la Loi portant protection de l’enfant : Une étude transversale des textes
La République Démocratique du Congo étant membre des Nations Unies et ayant ratifié la Convention de 1989 relative aux droits de l’enfant, se retrouve obliger d’adapté ses normes internes par rapport aux Règles des Nations Unies et à cette Convention, particulièrement à ce qui concerne la justice pour mineurs.
Les dispositions de ces textes pourrait-on rappeler préconisent une justice particulière et des procédures spécifique applicable à l’enfant en contact avec la justice pénale. Elles prônent une justice plus adaptée à l’être qu’elles considèrent vulnérable et sans défense. Ces dispositions constituent aujourd’hui dans le monde le leitmotiv de l’admiration de la justice pour enfant, en tel enseigne que si un Etat ne s’y conforme pas, l’on peut arriver à conclure qu’il ne protège pas efficacement, du moins sur le plan textuel, les enfants qui sont ses ressortissants. C’est ainsi, puisque comme nous l’avons précédemment dit, la RDC étant membre de l’ONU, et ayant un texte spécifique relatif à la protection de l’enfant,   il est plus que utile, d’examiner le niveau de la collaboration que ce texte entretien avec ces Normes et Règles de l’ONU relatives à la justice pour mineurs.
Précisons que l’étude préfère les expressions « enfants en conflits avec la loi » ou « enfant en contact avec la justice » en lieu et place de « délinquance juvénile », de « mineurs criminels », ou d’ « enfants délinquants » au motif que ces dernières expressions seraient stigmatisâtes, et auraient des effets pernicieux pouvant mettre à mal la réinsertion du mineur, même si il sont pourtant véritable auteur des faits infractionnels. C’est même dans cette logique que, les textes relatifs à la protection de l’enfant préfèrent la substitution terminologique, désignée par la doctrine de « déqualification pénale », des termes « infractions » et « peines » par « manquements » et « mesures ».
Lorsqu’il est question de parler de la justice pénale, la première notion qui traverse l’esprit est celle de la responsabilité pénale. En effet, cette question une fois qu’elle intéresse l’enfant, suscite un sérieux problème sur le plan doctrinal. Cependant, sans pour autant pénétré nous cette controverse doctrinale  qui semble depuis un temps pour d’aucuns être clairement résolue et éclairée par les textes tant au niveau international que national, il sied au moins de préciser le statut pénal de l’enfant (1) vu la place qu’il occupe dans la justice pour mineurs. Cet exercice sera suivi  des règles procédurales relatives  à la justice pour mineurs (2).  
1.      Le statut pénal de l’enfant en droit congolais
Face à une augmentation de la délinquance de mineur et à son aggravation, il n’est pas superfétatoire de réfléchir sur la responsabilité pénale des mineurs et ce, depuis l’adoption de la Loi portant protection de l’enfant. Cette Loi a pour principales ambitions de combler les lacunes du décret du 06 décembre 1950, de conformer le droit congolais aux standards du droit international, de réduire le fossé entre le droit et la pratique, surtout, de rapprocher les règles juridiques en cette matière aux réalités sociologique congolaise[21].
C’est en ce sens que notamment, dans son article 9, elle interdit dans un premier lieu de soumettre un enfant à des peines ou traitement cruels, inhumains et dégradant, et dans un second lieu de prononcer  la peine de mort et la servitude pénale à perpétuité pour les infractions commises par un enfant ; ceux-ci, avant de prévoir en son article 95 que l’enfant âgé de moins de quatorze ans bénéficie, en matière pénale, d’une présomption irréfragable d’irresponsabilité pénale.
On peut déduire de la lecture de ces articles que d’abord, pour les infractions commises par les enfants, le juge pourrait appliquer d’autres peines que la peine capitale ou peine de mort et la peine de servitude pénale à perpétuité. Aussi, les peines à infliger aux enfants doivent être humaines et dignes. Ensuite, on comprend que l’enfant de quatorze ans et plus, est pénalement responsable[22]. C’est ainsi que même, l’article 2 point 9 qualifie d’enfant en conflit avec la loi, enfant âgé de quatorze ans à moins de dix-huit ans, qui a commis un fait qualifié d’infraction par la loi pénale. C’est que la Loi portant protection de l’enfant n’irresponsabilité pas du tout l’enfant en matière pénale. Elle n’irresponsabilité en réalité qu’une catégorie d’enfants, ceux-âgé de moins de quatorze ans. [23]
En réalité, la fixation d’un âge minimum au-dessous duquel l’enfant est réputé irresponsable pénalement est une obligation et un vœu des Normes et Règles des Nations Unies relatives à la justice pour mineurs dont la RDC à travers sa Loi relative à la protection de l’enfant a voulu concrétiser. L’article 40.3 de la Convention Internationale relative aux Droits de l’Enfant (CIDE) l’énonce de la manière suivante « Les Etats parties s’efforcent…d’établir un âge minimum au-dessous duquel les enfants seront présumés n’avoir pas la capacité d’enfreindre la loi pénale ». Le paragraphe 14 c) des Directives relatives aux enfants dans les systèmes de justice pénale l’aborde de cette façon « Aucun enfant n’ayant atteint l’âge légal de la responsabilité pénale ne devrait être inculpé en matière pénale ». L’article 4.1 (2.2 a aussi) des Règles de Beijing quant à lui, s’exprime en ce terme « Dans les systèmes juridiques qui reconnaissent la notion de seuil de responsabilité pénale, celui-ci ne doit pas être fixé trop bas eu égard aux problèmes de maturité affective, psychologique et intellectuelle. »
Déjà au Benin, on pouvait lire à l’Ordonnance 69-23/PR/MJL du 10 juillet 1969 relative au jugement des infractions commises par les mineurs de 18 ans que « le mineur dont l’âge se situe entre 0 et 13 ans bénéficie d’une présomption d’irresponsabilité absolue… »
Le Comité des Nations Unies des droits de l’enfant renseigne que[24] :
« Plus d’une cinquantaine d’États parties ont relevé l’âge minimum après avoir ratifié la Convention ; l’âge le plus souvent fixé au niveau international est celui de 14 ans… Selon les connaissances actuelles dans les domaines du développement de l’enfant et des neurosciences, la maturité et la capacité d’abstraction des enfants âgés de 12 à 13 ans sont encore en pleine évolution, le cortex frontal n’ayant pas fini de se développer. Il est donc peu probable que ces enfants aient conscience de la portée de leurs actes ou comprennent une procédure pénale. Ils subissent en outre les effets de leur entrée dans l’adolescence[25]… De plus, les données dans les domaines des neurosciences et du développement de l’enfant montrent que le cerveau poursuit sa maturation après l’adolescence, ce qui a une incidence sur certains types de processus décisionnels. »
Christian Maes[26] argue que les conséquences de l’érosion du principe de l’application du droit commun à partir de 18 ans, de l’abdication devant le constat de la difficulté de précision des âges et le déroulement face au manque de respect des âges , une fois établis dans la loi, sont dévastatrices pour le système de justice juvénile spécialisée. Quand les juges de la jeunesse  ne seront plus appelés à gérer  tous les problèmes de société causé par les mineurs, mais quand ils se verront réduits à ne plus s’occuper que de délits et problèmes tout compte fait moindres et marginaux pour une tranche d’âge toujours plus courte (de 12 à 16 ans), la  politique ne ratera pas l’occasion de taxer la justice juvénile de superflue, désuète et onéreuse et, dès lors, de la remplacer par le système de droit commun des adultes assorti d’éventuelles er rares exceptions au niveau du renversement de la présomption et de la preuve.
Au sujet de la Loi congolaise sous examen, les professeurs Bienvenu Wane et Kasongo Lukoji opinent qu’elle pèche, soit par excès de zèle, soit par ignorance, soit par mimétisme. Elle ne définit pas clairement ses lignes Directrices. Tant et si bien qu’il semble extrêmement difficile de classer le droit congolais de l’enfant dans l’un des modèles existants. Prenant quelque chose dans presque tous, il parait simplement inclassable et atypique.[27]
Bien que considérée par la doctrine dominante en République Démocratique du Congo comme l’aboutissement du modèle protectionniste, dont les bases auraient été posées en 1950, cette loi contient paradoxalement des notions antipodiques de ce modèle, à savoir notamment : la prohibition de prononcer seulement certaines peines choisies, l’attribution de compétence pénale au Tribunal pour enfants, la subdivision de la minorité sur base du critère de discernement et la fixation d’un seuil d’irresponsabilité pénale sur cette même base (de discernement)…etc.
Dès lors, l’insinuation de l’existence de quelques mineurs capables de discernement, rapproche le régime congolais de 2009 à celui de ses homologues français et malien, lesquels, comparativement à lui, consacrent de manière claire, détaillée et bien réfléchie, un régime mixte, basé sur la recherche du discernement pour établir la responsabilité de type subjectif. En effet, la mixité des régimes français, et malien repose sur le mélange savamment orchestré des règles d’irresponsabilité pénale d’avec celles de responsabilité pénale des mineurs, selon les rangs et les circonstances. C’est qu’en droits français et malien, tout mineur n’est pas automatiquement pénalement irresponsable. On y trouve donc des mineurs, responsables pénalement, puisque capable de discernement ; mais (on y trouve) aussi des mineurs irresponsable pénalement, à cause de leur incapacité à discerner pour enfreindre la loi pénale.
Avec attention particulière, on se rend compte, que ce régime mixte qui caractérise aujourd’hui le droit congolais de l’enfant que porte principalement la loi n°09/001 du 10 janvier 2009.
En conséquence, un tel régime éloigne le système congolais du modèle d’irresponsabilité pénale totale de l’enfant, tant vantée, en s’appuyant sur le modèle belge (loi belge du 15 mai 2006), lequel a toujours utilisé une tournure juridique consistant à coïncider le seuil de discernement à celui de la majorité pénale, de sorte à ce que  la présomption d’irresponsabilité avec ses forces et ses faiblesses, s’applique automatiquement à tous les mineurs, considérés tous non-discernants. Il s’agit là en effet plutôt d’une irresponsabilité de type objectif. En claire, ce modèle belge sous-entend la capacité de discernement à l’âge de la majorité pénale. On y est donc capable de discernement, à la condition d’être majeur d’âge pénalement. De la sorte, tout celui qui est mineur d’âge serait incapable de discernement et automatiquement pénalement irresponsable, sur cette base essentiellement objective.
Ces deux auteurs conclus qu’il convient de reconnaitre que la législation congolaise d’aujourd’hui en matière d’enfants ne mérite plus d’être rangée du côté du modèle protectionniste. A cet effet, il s’impose désormais d’adopter un raisonnement adapté au contenu réel du texte actuellement en vigueur en droit congolais de l’enfant, et d’éviter d’interpréter ce texte du 10 janvier 2009 en ayant une conception ancienne, ou plutôt en recourant aux matériaux utilisés pour interpréter le décret du 06 décembre 1950 relatif à l’enfance délinquante ; encore que ce dernier n’était pas, il nous semble qu’un texte d’irresponsabilisation absolue en matière pénale, comme pourtant dogmatiquement affirmé.[28] Cette question du système congolais de justice pour mineurs, mérite d’y revenir avec plus amples détails, étant entendu qu’aujourd’hui, on a du mal à pointer du doigt le meilleur modèle de justice pour enfants.
Toutefois, de ce qui précède, on ne peut s’empêcher de constater cette complicité qui existe entre les Normes et Règles de Nations Unies et la Loi congolaise portant protection de l’enfant, dans l’établissement d’un seuil minimum de l’irresponsabilité pénale de l’enfant.
Le statut pénal du mineur congolais étant connu, étudions à présent transversalement les règles (judiciaire) de la loi portant protection de l’enfant et les normes et règles de l’ONU sur la justice de mineur d’abord en conflit avec la loi.
2.      La Procédure : l’instruction, la décision et l’exécution des décisions.
La protection judiciaire vise les enfants auxquels il est reproché un fait qualifié d’infraction et qui, en raison de leur minorité, ne peuvent être jugés et sanctionnés comme des adultes. L’objectif de la protection judiciaire est de faire primer l’intérêt supérieur de l’enfant en permettant que la procédure judiciaire recherche avant tout l’éducation et la socialisation de l’enfant.
Rappelons cependant que, la Loi portant protection de l’enfant distingue les enfants âgés de moins de 14  ans, qui bénéficient d’une présomption irréfragable d’irresponsabilité pénale en raison de leur absence de discernement (article 95, LPPE), des enfants âgés de 14 à 18 ans, dits « en conflit avec la loi », qui sont quant à eux responsables pénalement.
En créant un Tribunal pour enfants (TPE) en tant que juridiction spéciale, exclusivement compétente pour toutes les matières dans lesquelles se trouve impliqué un enfant en conflit avec la loi (article 99, LPPE), elle prévoit une procédure pour l’instruction et le jugement des affaires devant celui-ci qui diffère sur plusieurs points de la procédure pénale de droit commun (articles 103 et suivants, LPPE). Par exemple : un assistant social est affecté à chaque Tribunal pour enfants et aide le juge dans la détermination et l’application de la mesure à prendre, ou encore le procureur de la République n’adresse pas de réquisitoire sur la peine comme c’est le cas en procédure de droit commun, mais émet plutôt un avis.
Cependant, en République Démocratique du Congo, nul n’ignore qu’avant l’avènement de la Loi de 2009, la compétence de reconnaître les affaires dans lesquelles sont impliquées l’enfant, comme délinquant juvénile, revenait au Tribunal de paix. C’est ainsi, qu’il faut souligner qu’en réalité,  la création d’une juridiction spécialisée est une recommandation établie par l’article 40.3 de la CIDE qui l’énonce en ce terme : « les Etats parties s’efforcent de promouvoir… la mise en place d’autorités et des institutions spécialement conçues pour les enfants suspectés , accusés ou convaincus d’infraction à la loi pénale… ».
Le paragraphe 14 d) des Directives relatives aux enfants dans le système de justice pénale et le commentaire de l’article 5.1 des Règles de Beijing aborde aussi cette question pour le premier de manière suivante :
« Les Etats devraient mettre en place des tribunaux pour enfants, chargés principalement de juger les enfants délinquants et dotés de procédure spéciales visant à prendre en compte les besoins spécifiques des enfants » et pour le second «…C’est l’objectif principal des systèmes juridiques ou les cas des délinquants juvéniles sont examinés par les tribunaux pour enfants …».
Ajoutons à ceux-ci l’obligation faite aux Etats dans le cadre d’une prévention générale de la délinquance juvénile de recrutement de personnel spécialisé à tous les niveaux de l’administration publique (Voir paragraphe 9 i) des Principes directeurs de Riyad).
La justice congolaise pour mineurs est soumise au respect des certaines garanties procédurale (i), et les modes de saisine du Tribunal pour enfant étant clairement édictés par la loi, celui-ci justifie sa compétence personnelle avant de prendre quelles que mesures provisoires que ce soit (ii) ou d’instruire la cause et éventuellement de statuer sur le fond de l’affaire (iii) et de prendre une décision qui devra s’imposer (iv).   
        i.            Garanties procédurales
La protection judiciaire comporte des garanties procédurales dont le non-respect entraîne la nullité des poursuites engagées contre l’enfant (article 104, LPPE). Il s’agit du droit à la présomption d’innocence et à un procès équitable ; de la présence au procès ; du droit d’être informé, dans le plus bref délai, dans une langue qu’il comprend et de manière détaillée, de la nature et des motifs de l’accusation portée contre lui ; du droit à l’assistance par un conseil de son choix ou désigné d’office par le juge ; du droit de voir son affaire être jugée dans un délai raisonnable ; du droit à un interprète ; du droit au respect de sa vie privée à toutes les étapes de la procédure ; du droit d’être entendu en présence des parents, du tuteur, de la personne qui en a la garde ou de l’assistant social ; du droit de ne pas être contraint de plaider coupable ; du droit d’interroger ou de faire interroger des témoins à charge et d’obtenir la comparution et l’interrogatoire des témoins à décharge dans les mêmes conditions.
Parmi ces garanties procédurales, il est intéressant de souligner le droit d’être présent au procès, ce qui revient à dire que la procédure à l’égard de l’enfant ne peut jamais être par défaut (article 100, alinéa 6, LPPE). Par ailleurs, le droit au respect de la vie privée à toutes les étapes de la procédure a notamment pour conséquence le déroulement du procès à huis clos (article 111, alinéa 1, LPPE). La procédure de mise en œuvre de la protection judiciaire est prévue aux articles 102 et suivants de la loi sous examen.
Cependant, il convient de noter que la République Démocratique du Congo en édictant ces règles procédurales, elle se conforme à celle établies notamment par la Convention Internationale relative aux Droits de l’Enfant et aux Règles de Beijing qui les reprennent de la manière suivante :
« Les Etats parties veille en particulier : à ce que tout enfant suspecté ou accusé d’infraction à la loi pénale ait au moins le droit aux garanties suivantes : Etre présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie ; être informé dans le plus court délai et directement des accusations portées contre lui, ou, le cas échéant, par l’intermédiaire de ses parents ou représentants légaux , et bénéficier d’une assistance juridique ou de toute assistance pour la préparation et la présentation de sa défense ; que sa cause soit entendue sans retard par l’autorité ou l’instance judiciaire compétentes, indépendantes et impartiales, selon une procédure équitable aux termes de la loi, en présence de son conseil juridique ou autre assistance appropriée pour la préparation et la présentation de sa défense ; ne pas être contraint de témoigner ou de s’avouer coupable ; interroger ou faire interroger les témoins à charge , et obtenir la comparution et l’interrogatoire des témoins à décharge dans des conditions d’égalité ; se faire assister gratuitement d’un interprète s’il ne comprend ou ne parle pas la langue utilisée et que sa vie privée soit pleinement respectée à tous les stades de la procédure. » Pour la CIDE.[29]
« Les garanties fondamentales de la procédure telles que la présomption d’innocence, le droit à être informé des charges, le droit de garder le silence, le droit à l’assistance d’un conseil, le droit à la présence d’un parent ou tuteur, le droit d’interroger et de confronter les témoins et le droit à un double degré de juridiction sont assurées à tous les stades de la procédure.[30]
Tout au long de la procédure, le mineur a le droit d’être représenté par son conseil ou de demander la désignation d’un avocat d’office, lorsque des dispositions prévoyant cette assistance existent dans le pays.
Toute affaire doit, dès le début, être traitée rapidement, sans retard évitable. » Pour les Règles de Beijing.[31]
      ii.            Saisine et instruction de la cause
Il importe de noter que  l’Officier de Police Judiciaire (OPJ) qui a connaissance de faits portés contre l’enfant, suite à une interpellation dans un cas de flagrance par exemple, doit saisir sans délai le Tribunal Pour Enfant (TPE) par requête (article 102, LPPE), et en informer le l’Officier du Ministère Public (OMP), ainsi que les parents ou tuteur de l’enfant (article 103, LPPE). L’OMP peut également saisir le TPE par requête lorsqu’il apparaît que le suspect de faits qui lui sont transmis aux fins de poursuite par un OPJ ou par sa hiérarchie est un enfant (article 102, LPPE). La victime peut elle-même saisir le TPE soit directement par requête, soit à travers une plainte déposée entre les mains d’un OPJ ou d’un OMP qui saisira alors le Tribunal. Il peut, en outre, être saisi par l’assistant social d’une part ou par les parents ou tuteur de l’enfant d’autre part (article 102, LPPE). Enfin, l’article 102 de la LPPE précise que la saisine peut se faire d’office par le juge lui-même, bien que l’on imagine difficilement comment ce mode de saisine trouverait à s’appliquer, la pratique judiciaire en témoigne.
Apres sa saisine, le TPE doit vérifier la compétence personnelle de sa juridiction à l’égard de l’enfant. Celui-ci ne doit pas être âgé de plus de 18 ans, auquel cas le juge pour enfants se déclare incompétent. De plus, lorsque l’enfant a moins de 14 ans, l’article 95 de la LPPE lui accorde une présomption irréfragable d’irresponsabilité, ce qui implique la relaxe pour absence de discernement (article 96, LPPE). La détermination de l’âge est donc une étape centrale. Pour ce faire, le juge doit prendre en compte l’âge de l’enfant au moment de la commission des faits qui lui sont reprochés (article 98, LPPE).[32]
Soulignons que l’article 40.2 de la CIDE prévoit que :
«…Sa cause (celle de l’enfant présumé être en conflit avec la loi) soit entendue…en présence de son conseil juridique ou autre et, à moins que cela ne soit jugé contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant en raison notamment de son âge ou de sa situation, en présence de ses parents ou représentants légaux ».
Et les articles 15 et 16.1 des Règles de Beijing prévoient tour à tour que :
« Tout au long de la procédure, le mineur a le droit d’être représenté par son conseil ou de demander la désignation d’un avocat d’office, lorsque des dispositions prévoyant cette assistance existent dans le pays.  Les parents ou le tuteur peuvent participer à la procédure et peuvent être priés de le faire, dans l’intérêt du mineur, par l’autorité compétente. Celle-ci peut toutefois leur refuser cette participation si elle a des raisons de supposer que cette exclusion est nécessaire dans l’intérêt du mineur. » « Dans tous les cas, sauf pour les petites infractions, avant que l’autorité compétente ne prenne une décision définitive préalable à la condamnation, les antécédents du mineur, les conditions dans lesquelles il vit et les circonstances dans lesquelles le délit a été commis font l’objet d’une enquête approfondie de façon à faciliter le jugement de l’affaire par l’autorité compétente. »
C’est ainsi qu’on peut lire à l’article 110 de la Loi portant protection de l’enfant  qu’en vue de l’instruction de la cause, le juge pour enfants peut à tout moment convoquer l’enfant et les personnes qui exercent sur lui l’autorité parentale, et demander à l’assistant social de mener une enquête sur l’enfant ainsi que sur ses antécédents familiaux et scolaires ou encore prescrire une expertise médicale ou psychologique. Il s’agit là de la prise en compte des prescrit des dispositions de la Norme et des Règles de l’ONU ci-haut citées.
Par ailleurs, pendant et/ou après l’instruction, le juge pour enfants est appelés apprendre des mesures, s’il estime nécessaires, pour la réinsertion de l’enfant en conflit avec la loi mis en cause.
    iii.            La décision sur le fond
Avant de statuer sur le fond de l’affaire,  la loi reconnait au juge pour enfants la compétence de prendre de mesures provisoires à l’égard de l’enfant présumé être en conflit avec la loi.
Notons au préliminaire que ce n’est qu’après sa saisine et la vérification de sa compétence à l’égard de l’enfant que le juge pour enfants peut ordonner des mesures provisoires à l’égard de l’enfant qui sont sanctionner par le privilège du maintien de l’enfant autant que possible dans un environnement familial et dont l’assistant social a la responsabilité du suivi (article 106, LPPE). Elles peuvent consister à placer l’enfant sous l’autorité de ses parents ou de son tuteur ; à l’assigner à résidence sous la surveillance de ses parents ou de son tuteur ; ou le soustraire de son environnement et le confier à un couple de bonne moralité ou à une institution publique ou privée agréée à caractère social (article 106, LPPE).
Le juge procède à l’audition de l’enfant en présence des parents, du tuteur, de la personne qui en a la garde ou de l’assistant social. L’audience se déroule sans toge pour ne pas impressionner l’enfant. Le ministère public donne son avis sur le banc (article 111, LPPE) et tout ceci en huit clos.
À l’issue du traitement de l’affaire et dans les huit jours de la prise en délibéré, le juge pour enfants peut prendre différentes mesures de protection judiciaire, à savoir (articles 113 et suivants, LPPE) : réprimander l’enfant et le rendre à ses parents ou aux personnes qui exerçaient sur lui l’autorité parentale en leur enjoignant de mieux le surveiller à l’avenir ; le confier à un couple de bonne moralité ou à une institution privée agréée à caractère social pour une période ne dépassant pas sa dix-huitième année d’âge (ne s’applique pas à l’enfant âgé de plus de 16 ans) ; le placer dans une institution publique à caractère social pour une période ne dépassant pas sa dix-huitième année d’âge ; le placer dans un centre médical ou médico-éducatif approprié ; le placer dans un établissement de garde et d’éducation de l’État (EGEE) pour une période ne dépassant pas sa dix-huitième année d’âge.
L’ensemble de ces décisions prennent fin dès que l’enfant atteint l’âge de 18 ans. Cependant, le législateur donne la possibilité au juge de prolonger une décision de placement dans un EGEE jusque l’âge de 22 ans au maximum pour des manquements graves (article 115, LPPE), voire  jusqu’à l’âge de 28 ans dans les cas les plus graves (article 116, LPPE). Lorsque le manquement est reproché à un enfant de 15 ans au moins et est particulièrement grave d’une part, et que l’enfant est récidiviste ou fait preuve d’une « perversité caractérisée » d’autre part, le juge peut décider de placer l’enfant dans un établissement de rééducation de l’État (EREE) pour un à dix ans au plus.
La Loi prévoit enfin une dernière mesure apparemment intéressante qui est celle du régime de liberté surveillée. Cependant, le législateur ne détaille pas les conditions et modalités de fonctionnement de ce régime, de sorte que son application s’avère pour le moment impossible. Toutes ces mesures sont prises sans préjudice du paiement de dommages et intérêts à la victime éventuelle par les personnes civilement responsables de l’enfant, c’est-à-dire essentiellement ses parents ou tuteur (article 119).
Cependant, que pour les mesures provisoire que pour les décisions sur fond du juge pour enfants, ceci doit être conduit dans le respect de certains principes au nombre desquels nous citons :
-          L’intérêt supérieur de l’enfant (L’article 6 de la LPPE), il s’agit du souci de sauvegarder et de privilégier à tout prix ses droits de sorte qu’il reste et demeure la  préoccupation primordiale dans toutes les décisions et mesures prises à son égard;
-          recours au placement en institution comme mesure de dernier ressort(Les articles 64 alinéa 2 et 104 alinéa 3 de la LPPE.) Tout comme le recours à la privation de liberté, le placement en milieu fermé reste également une mesure non prioritaire.
Le placement de l’enfant dans une institution comme mesure de dernier ressort découle notamment du point 18 des Directives relatives aux enfants dans le système de justice pénale des articles 37 b) de la CIDE et 19.1 des Règles de Beijing. En effet, les influences négatives en milieu institutionnel, les effets physiques, psychologiques et psychiques de la privation de liberté ou de la perte de liberté, et l’impact de la séparation avec le milieu social habituel poussent à mettre l’accent plutôt sur le traitement éducatif en milieu ouvert. Le placement en institution doit être une décision de dernier recours qui doit être aussi bref que possible en cohérence avec le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant et servir l’objectif de réinsertion durable de l’enfant placé. Tout placement doit faire l’objet de révision périodique. Le système de justice pour enfants de la LPPE se fonde sur une philosophie qui prône la rééducation et la réinsertion de l’enfant (article 64 alinéa 1). Il tient compte, comme le souligne l’article 40 alinéa 1 de la CIDE, de la « nécessité de faciliter sa réintégration dans la société et de lui faire assumer un rôle constructif au sein de celle-ci ». Le traitement éducatif est une composante majeure de l’administration de la justice pour enfants.[33]
Il ne va pas sans intérêt de faire remarquer qu’à ses articles 3 et 37, la Convention Internationale relative aux Droits de l’Enfant prévoient respectivement que :
« Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale… » « … tout enfant privé de liberté soit traité avec humanité et avec le respect dû à la dignité de la personne humaine, et d’une manière tenant compte des besoins des personnes de son âge. En particulier, tout enfant privé de liberté sera séparé des adultes, à moins l’on estime préférable de ne pas le faire dans l’intérêt supérieur de l’enfant, et il a droit de rester en contact avec sa famille par la correspondance et par les visites, sauf circonstances exceptionnelles. »
Le paragraphe 20 des Directives relatives aux enfants dans le système de justice pour pénale souligne à son tour que :
« afin de maintenir un lien entre le mineur détenu et sa famille et la communauté, ainsi que pour faciliter sa réinsertion sociale, il est important que la famille ou les personnes s’intéressant légitimement à l’enfant puissent avoir facilement accès à l’établissement où l’enfant est privé de liberté à moins que l’intérêt de l’enfant n’exige le contraire ».
Aussi les articles 17.1-3,18 et 20.3 des Règles de Beijing qui prévient respectivement que :
« La décision de l’autorité compétente doit s’inspirer des principes suivants: La décision doit toujours être proportionnée non seulement aux circonstances et à la gravité du délit, mais aussi aux circonstances et aux besoins du délinquant ainsi qu’aux besoins de la société;  Il n’est apporté de restrictions à la liberté personnelle du mineur – et ce en les limitant au minimum qu’après un examen minutieux; La privation de liberté individuelle n’est infligée que si le mineur est jugé coupable d’un délit avec voies de fait à l’encontre d’une autre personne, ou pour récidive, et s’il n’y a pas d’autre solution qui convienne;  Le bien-être du mineur doit être le critère déterminant dans l’examen de son cas. La peine capitale n’est pas applicable aux délits commis par les mineurs.  L’autorité compétente peut assurer l’exécution du jugement sous des formes très diverses, en laissant une grande souplesse pour éviter autant que possible le placement dans une institution. De telles mesures, dont plusieurs peuvent être combinées, figurent ci-après: Ordonner une aide, une orientation et une surveillance; Probation; Ordonner l’intervention des services communautaires; Amendes, indemnisation et restitution;  Ordonner un régime intermédiaire ou autre;  Ordonner la participation à des réunions de groupes d’orientation et à d’autres activités analogues; Ordonner le placement dans une famille ou dans un centre communautaire ou autre milieu éducatif;  Autres décisions pertinentes. …Aucun mineur ne sera soustrait à la surveillance de ses parents, que ce soit partiellement ou totalement, à moins que les circonstances ne rendent cette séparation nécessaire. Les mineurs ne sont pas soumis à des châtiments corporels, visée à l’article 14.1 ci-dessus, l’autorité elle-même ou une autre autorité, selon le cas, prendra les mesures qui s’imposent ».
En fin, la décision du juge est bien entendue susceptible de l’opposition et  d’appel devant pour la première la chambre qui a rendu la décision en opposition et pour le second devant une chambre du même tribunal, mais composée de trois juges (articles 123 et 124, LPPE). La loi prévoit enfin la possibilité pour le juge de réviser la mesure prise à l’égard de l’enfant à tout moment, soit d’office soit à la demande de toute personne intéressée, et doit, pour ce faire, visiter le lieu de placement de l’enfant (article 125, LPPE). La grande difficulté que rencontrent les juges pour enfants dans la pratique, et qui se retrouve d’ailleurs au niveau de l’adoption des mesures provisoires, est le manque d’EGEE ou autres institutions publiques à même d’assurer le placement de l’enfant dans une perspective de resocialisation.[34]
D’une manière générale, il y’a lieu de noter que, le constituant ainsi que législateur congolais ont organisé les voies de recours pour permettre aux justiciables d’attaquer les jugements et les arrêts dont ils ne seraient pas satisfaits. Autrement dit, celles-ci visent à examiner des procès déjà jugés en vue de leur modification, totale ou partielle ou l’annulation des décisions attaquées. Il est évident que les voies de recours constituent pour les parties lésées un moyen procédural indispensable pour la garantie de leurs droits contre les actes juridictionnels qui comportent des erreurs ou des injustices; étant donné que l’exercice de ce droit peut nuire à la nécessaire rapidité de la justice, il est indiqué de soumettre l’exercice de cette faculté de faire faire examiner un acte juridictionnels à des conditions spécifiques.
Par ailleurs, Le Comité des Nations Unies des droits de l’enfant renseigne que[35] des mesures concernant les enfants qui évitent le recours à une procédure judiciaire ont été intégrées dans de nombreux systèmes partout dans le monde ; elles sont généralement appelées « mesures de déjudiciarisation ». La déjudiciarisation consiste à soustraire les affaires au système de justice pénale formel, généralement pour privilégier des programmes ou des activités. La déjudiciarisation devrait être la solution à privilégier dans la majorité des affaires concernant des enfants. Les États parties devraient sans cesse étendre l’éventail des infractions pour lesquelles la déjudiciarisation est possible, jusqu’à y inclure des infractions graves, au besoin. Des possibilités de déjudiciarisation devraient pouvoir être offertes aussitôt que possible après l’entrée en contact avec le système de justice et aux divers stades de la procédure.
Il tient à souligner ce qui suit : a) Il ne faudrait recourir à la déjudiciarisation que lorsqu’il existe une preuve irréfutable que l’enfant a commis l’infraction qui lui est imputée ou lorsque l’enfant reconnaît librement et volontairement sa responsabilité, sans avoir subi d’actes d’intimidation ou de pressions, étant entendu que son aveu ne sera pas exploité à son détriment dans d’éventuelles poursuites judiciaires ; b) Pour donner son consentement libre et volontaire à la mesure de déjudiciarisation, l’enfant devrait disposer d’informations suffisantes et précises sur la nature, la teneur et la durée de cette mesure et comprendre quelles seraient les conséquences d’une absence de coopération ou de l’inexécution de la mesure ; c) La loi devrait préciser dans quels cas la déjudiciarisation est possible, et les décisions en la matière relevant de la police, des procureurs ou d’autres organismes devraient être réglementées et pouvoir être réexaminées. Tous les agents de l’État et acteurs qui participent au processus de déjudiciarisation devraient recevoir la formation et l’appui nécessaires ; d) L’enfant doit avoir la possibilité de bénéficier d’une aide juridique ou de toute autre assistance appropriée en ce qui concerne la mesure de déjudiciarisation offerte par les autorités compétentes et doit pouvoir demander le réexamen de ladite mesure ; e) Les mesures de déjudiciarisation ne devraient pas englober la privation de liberté ;  f) Une fois la mesure de déjudiciarisation exécutée, l’affaire devrait être définitivement classée. Les archives confidentielles concernant cette mesure qui peuvent être conservées à des fins administratives ou à des fins de réexamen, d’enquête et de recherche ne sauraient être considérées comme des condamnations pénales ou donner lieu à une mention au casier judiciaire.
En ce sens, la CIDE demande aux Etats parties de : « prendre des mesures, chaque fois que cela est possible et souhaitable, pour traiter ces enfants sans recourir à la procédure judiciaire. »[36] Les Directives relatives aux enfants dans le système de justice pénale s’est fixées comme objectifs notamment joint aux Etats membres de l’ONU de : « recourir à des mécanismes informels pour régler les cas où des jeunes sont mis en cause, notamment la médiation et les mesures de réparation, en particulier lorsqu’il y’a des victimes. »[37] Les Règles Beijing abordent dans le même sens en arguant qu’ : « on s'attachera, dans toute la mesure possible, à traiter le cas des délinquants juvéniles en évitant le recours à une procédure judiciaire devant l'autorité compétente visée à l'article 14.1 ci-après.  La police, le parquet ou les autres services chargés de la délinquance juvénile ont le pouvoir de régler ces cas à leur discrétion, sans appliquer la procédure pénale officielle, conformément aux critères fixés à cet effet dans leurs systèmes juridiques respectifs et aussi aux principes contenus dans le présent Ensemble de règles.  Tout recours à des moyens extra-judiciaires impliquant le renvoi aux services communautaires ou autres services compétents exige le consentement de l'intéressé ou de ses parents ou de son tuteur, étant entendu que cette décision de renvoyer l'affaire peut, s'il en est fait la demande, être subordonnée à un réexamen par une autorité compétente.  Afin de faciliter le règlement discrétionnaire des cas de délinquants juvéniles, on s'efforcera d'organiser des programmes communautaires, notamment de surveillance et d'orientation temporaires, et d'assurer la restitution des biens et l'indemnisation des victimes. »[38]  
C’est ainsi qu’en République Démocratique du Congo, la Loi portant protection de l’enfant offre la possibilité au juge pour enfants de recourir à la médiation lorsqu’il estime que les faits reprochés à l’enfant sont bénins et qu’il n’y a pas de récidive (article 136, LPPE) ou que le manquement reproché est constitutif en droit commun d’une infraction punissable de moins de 10 ans de servitude pénale (article 137, LPPE). Le juge peut alors se dessaisir dans les 48 heures au profit du comité de médiation. La médiation est ainsi définie comme un « mécanisme qui vise à trouver un compromis entre l’enfant en conflit avec la loi ou son représentant légal, et la victime ou son représentant légal ou ses ayants droits sous réserve de l’opinion de l’enfant intéressé dûment entendu » (article 132, LPPE). Par cette innovation en droit judiciaire congolais, l’objectif est d’épargner à l’enfant les inconvénients d’un procès par la déjudiciarisation du cas, de favoriser sa réinsertion tout en permettant la réparation de l’éventuel dommage causé à la victime (article 133, LPPE). En effet, dans le cas où l’affaire a été traitée en médiation, celle-ci peut aboutir à un compromis par les parties sur base d’une ou plusieurs des mesures suivantes (article 134, LPPE) : l’indemnisation de la victime ; la réparation matérielle du dommage ; la restitution des biens à la victime ; la compensation ; les excuses expresses présentées de façon verbale ou écrite à la victime ; la réconciliation ; l’assistance à la victime ; le travail d’intérêt général ou prestation communautaire.
Avec la signature du compromis de médiation, la procédure engagée devant le Tribunal prend fin. Le juge pour enfants appose alors sur le compromis la « formule exécutoire », c’est-à-dire qu’il le rend exécutoire par le recours à un huissier de justice pour recouvrer les indemnités ou les biens à restituer par exemple, et au besoin par la force publique (article 141, LPPE). Si la médiation n’aboutit pas, la procédure judiciaire reprend son cours.
En clair, il s’agit de la rencontre entre auteur et victime d’infraction devant une personne neutre (le médiateur) qui vise à la fois la réparation (partielle ou totale) du dommage subi par la victime et la prise de conscience de l’auteur du tort qu’il a causé en le dissuadant de récidiver.
CONCLUSION
La délinquance des mineurs met la justice des mineurs devant certain nombre de défi, notamment d’une part, celui de répondre à une aggravation sensible des manifestations délinquantes, tant en quantité (augmentation significative des délits commis par les mineurs, courbe statiques ascendante) qu’en qualité (actes de plus en plus graves commis par de très jeunes auteurs, recours accru à  la violence , toxicomanie, crime en série) et d’autre part,  celui de répondre aux besoins de sécurité de la population qui vit cette augmentation largement reprise par les medias et qui est d’accord avec un droit spécifique pour les mineurs délinquants (en conflit avec la loi), pour autant que ce droit réponde à ses attentes en matière sécuritaire et prenne en charge efficacement les auteurs mineurs.[39]
Dans l’évolution de cette délinquance juvénile, il faut remarquer en indiquant une fin de 20e siècle marquée par l’avènement des textes de portée internationale dans la sphère de la justice des mineurs qui ont influencé le droit pénal des mineurs et la prise en charge des jeunes en contact avec la justice. C’est aussi dans cette perspective que la République Démocratique du Congo à réserver dans sa Loi portant protection de l’enfant des dispositions relatives à la protection judiciaire de de l’enfant, spécifiquement, cette Loi prévoit toute une section se rapportant à cette matière.
De la lecture transversale des Normes et Règles des Nations Unies relatives à la justice pour mineurs et la Loi congolaise portant protection de l’enfant on peut constater que cette dernière incarne la lettre et l’esprit de celles-là néanmoins celles qui ont été épinglées, en ce qui concerne l’enfant en conflit avec la loi. En établissant clairement le seuil minimum de la responsabilité pénale, en prévoyant des garanties procédurales cela dans la prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant d’une part, et en organisant de mesures pouvant concourir à la réinsertion et resocialisation de l’enfant, en consacrant pour ces mesures de voies de recours, ce qui est encore intéressant elle prévoit un mécanisme extra judiciaire afin de faire éviter à l’enfant les caprices judiciaires.
 
 



[1] Système de justice pour enfants : la législation, les normes et règles, les procédures, les mécanismes et les dispositions spécifiquement applicables aux enfants considérés comme des auteurs d’infractions, et les institutions et organes mis en place pour s’occuper de ces enfants
[2] En matière d'enfants en conflit avec la loi, l'idée centrale est que, en raison de leur âge et de leur immaturité, les enfants appellent un traitement distinct et différent de celui qui s'applique aux adultes dans les procédures pénales. Cette idée repose sur la vulnérabilité propre aux enfants et sur leur discernement limité puisque leur personnalité n'est pas encore pleinement formée. Non seulement toute mesure prise doit être évaluée en fonction de l'intérêt supérieur de l'enfant, mais la justice des mineurs doit tenir compte en outre des besoins en matière de soins et de développement des enfants afin qu'ils soient réinsérés dans leur groupe social en citoyens respectueux de la loi. Lire,  Nations Unies (Office Contre la Drogue et le Crime)., Questions transversales-justice des mineurs : Compilation d’outils d’évaluation de la justice pénale, New York, 2008.
[3] Organisation des Nations Unies (Office Contre le Drogue et le Crimes)., Recueil des règles et normes des Nations Unies en matière des préventions du crime et de justice pénale, New York, 2007, p. Vii.
[4] M. LACHET., « Les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté du 14.12.1990 (dites Règles de la Havane ou RPL) », in Séminaire de formation en justice des mineurs pour magistrats et autres acteurs en justice juvénile de l’Afrique francophone. Séminaire de Ouagadougou du 29 novembre au 3 décembre 2004, Working repport 1-2005, pp. 69-70.
[5] O. D’AMOUR, « Règles de Beijing (1985). Ensemble des règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs », in Séminaire de formation en justice des mineurs pour magistrats et autres acteurs en justice juvénile de l’Afrique francophone. Op.cit., p.47.
[6]Voir Examen des rapports initiaux des Etats parties attendus en 2004, présentés par les Etats parties en application du paragraphe 1 de l’article 8 du Protocole Facultatif à la Convention internationale relative aux Droits de l’Enfant, concernant l’Implication d’Enfants dans les Conflits Armés, rapport de la RDC, reçu le 21 janvier 2009, pp.10-11. Précisons que la République démocratique du Congo est tenue de soumettre des rapports périodiques au Comité des droits de l’enfant décrivant les mesures prises pour assurer la mise en œuvre effective de ses engagements. Le rapport initial concernant la mise en œuvre de la CIDE a été soumis le 8 août 2000 et les observations finales du Comité des droits de l’enfant ont été rendues le 9 juillet 2001. Par la suite, le 24 juillet 2008 a été présenté un premier rapport périodique qui a également fait l’objet d’observations finales rendues le 10 février 2009. Un second rapport périodique a été soumis en 2012 et a été étudié par le Comité des droits de l’enfant en juin 2016.
[7] Une étude à paître va se focaliser essentiellement sur la question de la protection judiciaire e l’enfant victime d’une infraction et témoin/renseignant dans la procédure pénale congolaise.
[8] Organisation des Nations Unies, Office Contre le Drogue et le Crimes, Recueil des règles et normes des Nations Unies en matière des préventions du crime et de justice pénale, Op.cit., p.108.
[9] Idem.
[10] Nations Unies., Rapport du Conseil Economique et Social pour l’année 1996, AG, Documents Officiels.51eme année simplement, N°3 (A/51/3/Rev.1), New York, 1997, pp.144-146.
[11] Le 7 février 1978, la Pologne présente à la Commission des droits de l’Homme de l’ONU un projet de Convention relative aux droits de l’enfant qui comportait 19 articles dont 10 à caractère normatif et 9 à caractère procédural. Ce texte proposait des dispositions contraignantes. C’est ton son mérite et sa démarcation de la majorité des textes qui l’ont précédé (Déclaration de Genève sur les Droits de l’Enfant de 1924, Déclaration des Droits de l’Enfant de 1959, …). La Pologne suggèrera que ce texte soit adopté l’année suivante pour bien marquer le vingtième anniversaire de la Déclaration de Genève. L’ONU déclarera 1979 « année international de l’enfant » dans l’espoir de susciter une prise de conscience collective et motiver les Etats à agir pour la protection et la garantie des Droits des Enfants. Au cours de cette année, la Commission des Droits de l’Homme va créer un groupe de travail chargé de rédiger la future CIDE. Les discutions en vue de l’élaboration de la Convention des Nations Unies relatives aux Droits de l’enfant commencèrent en 1979 à Genève. Le 20 novembre 1989, sur recommandation de la Commission des Affaires Sociales et Humanitaires, l’Assemblée Générale des Nations Unies adopte enfin la Convention Internationale relative aux Droits de l’Enfant (Résolution 44/25) et l’ouvre à la signature, à la ratification et à l’adhésion des Etats. La Convention sera adoptée par acclamation, à l’unanimité des pays membres des Nations Unies. À ce jour, tous les Etats du monde sont parties à cette Convention, exception faite des Etats-Unis d’Amérique qui l’ont tout simplement signé, ce qui en fait un instrument de portée universelle. Il y a beaucoup à dire sur cette convention, mais le propos doit se circonscrire ici. Remarquons toutefois, d’une manière générale, que cette convention introduit plusieurs notions fondamentales qui ont une influence directe ou indirecte sur l’administration de la justice juvénile : le critère de l’intérêt supérieur de l’enfant (art. 3), le principe de non-séparation d’avec les parents (art. 9), l’obligation d’entendre la parole de l’enfant (art. 12), la responsabilité des parents (art. 18) l’interdiction de la peine capitale, de la torture, de traitements cruels, inhumains ou dégradants (art. 37), la privation de liberté vue comme mesure ultima ratio (art. 37 litt. b), la reconnaissance des droits procéduraux du mineur (art. 40). Elle comprend deux articles qui font référence directe à la justice des mineurs (art. 37 et 40). L’ article 40 est consacré entièrement à la justice des mineurs, à quelques principes de base à respecter pour une justice juvénile spécifique (al. 1), à la procédure souhaitable applicable aux mineurs(al. 2), à la législation à prévoir (notamment sur l’âge minimal d’intervention et sur le recours systématique aux mesures extra-judiciaires) (al. 3) et au dispositif de prise en charge à mettre en place pour les jeunes délinquants.
[12] C’est le texte le plus important pour la procédure pénale; il s’agit des Règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs du 29 novembre 1985 « Résolution 40/33 » (dites Règles de Beijing). Elles donnent aux États des lignes directrices pour tenir compte de la protection des droits de l’enfant et le respect de leurs besoins lors de l’élaboration de systèmes spécialisés de justice pour mineurs.Bien que  non contraignantes, elles comblent une lacune. En effet, tous les textes antérieurs établis par les Nations Unies (Pacte de 1966 sur l’exercice des droits civils et politiques et minima pour le traitement des détenus de 1955) ne faisaient pas référence explicite à la justice des mineurs, d’où la nécessité de ce premier instrument international. Ces règles de 1985 sont donc antérieures à la Convention, mais il est intéressant de constater que la CIDE a repris les principales dispositions de Beijing pour leur donner ainsi une valeur contraignante. De très nombreux articles intéressent la procédure pénale proprement dite ou l’organisation judiciaire. Ce texte court (30 articles seulement) est important car il définit de manière très précise la manière dont la justice des mineurs doit intervenir auprès des jeunes dans les trois phases de l’instruction, du jugement et de l’exécution. citons de manière subjective et sous forme lapidaire 10 principes fondamentaux contenus dans ce texte : la nécessité d’un traitement équitable et humain; la déjudiciarisation par des alternatives; la prise en compte de la parole du mineur; la privation de liberté comme mesure de dernier ressort et la plus brève possible;  la privation de liberté, réponse aux seuls cas graves; exclusion de la peine capitale et du châtiment corporel;  le placement : mesure d’exception; spécialisation des organes de la justice des mineurs; objectif de la justice juvénile : la réinsertion; libération de la mesure dès que possible.
[13]  Ce texte en la matière n’est pas dénué d’intérêt puisqu’il parle des règles à observer pour les mineurs privés de liberté, sujet souvent brûlant, parfois tabou. Les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté du 14 décembre 1990 « Résolution 45/112 » (dites Règles de la Havane ou RPL), troisième pilier de cet édifice (justice pour mineurs), a un objectif clairement défini : la protection et le bien-être des mineurs privés de liberté, c’est-à-dire de toutes les personnes de moins de 18 ans qui sont sous le coup d’une privation de leur liberté (soit sous forme de détention ou emprisonnement, soit sous forme de placement dans un établissement public ou privé), ordonnée par une autorité judiciaire, pour parer aux effets néfastes de la privation de liberté en garantissant les droits de l’enfant. Il est certain que dans la procédure, au moment où il va être question de détention préventive notamment, ces principes vont intervenir et devront inspirer également les législateurs. D’ailleurs, une place particulière est réservée à la détention avant jugement et au respect de certaines règles pour les gardes à vue ou les séjours dans les commissariats de police. C’est, en effet, dans ce domaine que le plus grand nombre de lésions des droits de l’enfant sont commises à travers le monde.
[14] Pour amples détails sur l’essentiel de ces instruments, lire NGOTO Ngoie NGALINGI., Guide de protection de l’enfant, Editions Droit et Société, Kinshasa, 2017, pp.17-22. J. ZERMATTEN., La prise en charge des mineurs délinquants : Quelques éclairages à partir des grands textes internationaux et d’exemples européens, Exposé présenté aux Journées de formation pluridisciplinaire Charles-Coderre à Sherbrooke, le 2 mai 2002. pp.16-20.
[15] Directives para 4.
[16] Directives para 8.
[17] Directives para 9.
[18] La République Démocratique du Congo s’est longtemps vu imposer l’ordre juridique belge du fait de la colonisation. En 1950 déjà, le législateur colonial avait adopté la loi belge de la protection de l’enfance du 15 mai 1912 dite loi CARTON DE WIART aux réalités congolaises et édictera le décret du 6 Décembre 1950 sur l’enfance délinquante. De nos jours, la R.D Congo a ratifié la Convention Internationale relative aux Droits de l’Enfant en date du 21 Aout 1990 par l’ordonnance-loi n°90 /48du 22 AOUT 1990. Elle a également ratifié la Charte Africaine de Droit et du Bien-Etre de l’enfant par décret-loi n°007 du 28 Mars 2001. La Constitution du 18 Février 2006 telle que modifiée par la loi n°11/002 du 20 Janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution du 18 Février 2006, reprend les principes fondamentaux portés par ces deux instruments internationaux et fixe les orientations d’une loi en matière de protection de l’enfant. Cf. J. KANYINDA WA KANYINDA., « Les articles 14.2 (c) du Protocole de Maputo et 174 K du Décret du 30 janvier 1940 portant Code pénal : Entre la protection de la mère enceinte et celle de l’enfant simplement conçu », in Revue-Juristudes (en ligne), Marrakech, juin 2020, p. 19. Disponible sur internet à l’adresse : https://revue.juristudes.com/2020/06/les-articles-142c-du protocole-de.html.pdf. Consulté le 10 juin 2020, à 11heures 25.
[19] Loi n°09/001 du 10 Janvier 2009 portant protection de l’enfant en République Démocratique du Congo, in JO RDC n° spécial du 25 mai 2009.
[20] Notamment, J. IDZUMBUIR ASSOP., La protection de l’enfant en RD Congo analyse critique et perspectives, Editions CEDESURK, Kinshasa, 2013.  NGOTO NGOIE NGALINGI., Guide de la protection de l’enfant, Op.cit., Yao AGBETSE., Recueil sur la justice pour enfants en République démocratique du Congo, Analyse et commentaires de la législation applicable aux enfants en conflit avec la loi et victimes, Bureau International Catholique de l’Enfance (BICE), 2ème édition, Genève-Kinshasa, juillet 2018.
[21] Voir J. IDZUMBUIR ASSOP., La protection de l’enfant en RD Congo analyse critique et perspectives, Op.cit., p.21.  R.KIENGE KIENGE INTUNDI., Le contrôle policier de la délinquance des jeunes à Kinshasa : Une approche ethnographique en criminologie, Academia Bruyant & Kazi, Louvain-la-Neuve & Kinshasa, 2011, p.32.
[22] C’est le discernement qui constitue la clé d’excuse de peine dont bénéficient les mineurs  âgés de moins de 14 ans. Cette disposition (article 95 de la LPPE) bat complètement en brèche toute la théorie construite autour de l’irresponsabilité pénale de tous les mineurs en doit Congolais. Cf. S. NKASHAMA., « La loi portant protection de l’enfant : son contenu et les défis pour sa mise en œuvre », Rapport final du Séminaire international sur les droits de l’enfant en RDC, Kinshasa, 02-06 mars 2009, pp.8-9.
[23] NGOTO Noie NGALINGI., Guide de la protection de l’enfant, Op.cit., p.58-59.
[24] Comité de droits de l’enfant de Nations Unies, CRC/C/GC/C/24, Observation générale n°24 (2019) sur les droits de l’enfant dans le système de justice pour enfants, Genève, 18 septembre 2013.
[25] Dans son observation générale n° 20 (2016) sur la mise en œuvre des droits de l’enfant pendant l’adolescence, le Comité des droits de l’enfant des Nations Unies renseigne que : « l’adolescence correspond à un stade du développement humain sans équivalent qui se caractérise par un développement rapide du cerveau, ce qui se reflète dans la prise de risques, certains types de processus décisionnels et la capacité de contrôler ses impulsions. »
[26] C.MAES, « Quelques aspects de procédure : Les âges d’intervention », in Séminaire de formation en justice des mineurs pour magistrats et autres acteurs en justice juvénile de l’Afrique francophone. Séminaire de Ouagadougou du 29 novembre au 3 décembre 2004, Working repport 1-2005, p.105.
[27] B. WANE BAMEME et G-D. KASANGO LUKOJI, « La responsabilité pénale des mineurs en droit international et en droit congolais : Entre un pragmatisme justifié et un dogmatisme affirmé », in Fiat Justicia, 12(3), 2018, p.272.
[28] B. WANE BAMEME et G-D. KASANGO LUKOJI, « La responsabilité pénale des mineurs en droit international et en droit congolais : Entre un pragmatisme justifié et un dogmatisme affirmé », Op.cit., pp.273-274.
[29] Article 40.2 de la Convention Internationale relative aux Droits de l’Enfant.
[30] Les articles 14 et suivants du présent Ensemble de règles minima précisent les éléments importants de la procédure dans les poursuites contre mineurs, en particulier, alors que l’article 7.1 affirme d’une façon générale les garanties les plus essentielles de la procédure.
[31] Les articles 7.1, 14, 15 et 20.1 de Règles de Beijing.
[32] Étant donné qu’en République Démocratique du Congo, une grande majorité des naissances ne sont pas enregistrées dans le délai légal de 90 jours prescrit par l’article 16 de la LPPE, beaucoup d’enfants ne possèdent pas d’acte de naissance et se voient donc dans l’impossibilité d’établir leur âge à partir de l’état civil. Il existe la possibilité d’obtenir du juge un jugement supplétif qui remplace l’acte de naissance, mais dans les faits, cette procédure est complexe et payante. À défaut d’acte de naissance, le juge pour enfants tente de forger sa conviction à partir d’éléments tels que des bulletins scolaires ou des témoignages de proches. L’expertise médicale est en théorie une possibilité, mais en l’absence d’équipements appropriés dans les structures médicales et en raison du coût que cela suppose, on n’y recourt pas souvent. En cas de doute sur l’âge réel, l’article 110, alinéa 4 prescrit une présomption de minorité, ce qui signifie que l’individu est considéré comme un enfant.
[33] Yao AGBETSE, Recueil sur la justice pour enfants en République démocratique du Congo, Analyse et commentaires de la législation applicable aux enfants en conflit avec la loi et victimes, Op.cit., pp.186 et s.
[34] Pour aller plus loin sur les voies e recours devant le Tribunal pour enfants en République Démocratique u Congo, lire Junior KANYINDA WA KANYINDA, « Quelques aspects de procédure devant le Tribunal pour enfants : Voies de recours », à paraître.
[35] Comité des droits de l’enfant des Nations Unies, CRC/C/GC/24, Observation générale N°24 (2019) sur les droits de l’enfant dans le système de justice pour enfants, du 18 septembre 2019.
[36] Article 40.3 b). de la Convention Internationale relative aux droits de l’enfant.
[37] Directives 15.
[38] Règles 11.
[39] Lire en ce sens J.ZERTEMATTEN, La prise en charge des mineurs délinquants : Quelques éclairages à partir des grands textes internationaux et d’exemples européens,  Op.cit. p.5.

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